Passe ton CAG d'abord

Sonia Piotelat, 02/2016

Texte écrit pour le prix Charlie Hebdo

 

Après ne pas être sorti pendant deux mois à cause des révisions, tu es aussi pâle qu'Edouard Pattinson dans Twilight mais par contre, les filles ne te courent pas après. En fait, non, c'est plutôt toi qui a couru après ton diplôme. Tu penses que tu vas enfin pouvoir gagner ta vie en faisant un taf au Mac do près de chez toi : mais tu te rends vite compte qu'il fallait écouter ta mère et faire des études.

Donc tu te rends dans un amphithéâtre surpeuplé et là, tu compatis avec les sardines en boîte, sauf qu'elles, elles sont déjà mortes ; mais toi tu es mort d'ennui et tu fais le décompte des secondes avant le week-end ; sauf que le week-end, comme tu bosses au Mac Do, avec un superbe parfum de friture, tu veux retourner dans ton amphi surpeuplé.

Après trois ou quatre ans dans cet enfer, tu te présentes chez plusieurs entreprises en disant que tu es super motivé à lécher les bottes du boss de l'entreprise. Tu effectues des stages avec des patrons dictateurs à mi-temps et la tu te dis que la vie est une pute.

Mais tu as réuni assez d'argent pour avoir ton studio deux pièces que même les poissons rouges de ta mémé Germaine ont plus d'espace pour vivre que toi dans ton studio, en colocation avec un autre mec aussi exploité que toi.

Et pendant les dîners de famille, ton petit cousin te dit que plus tard il sera exploraventurier comme Indiana Jones à la recherche d'un trésor. Tu hésites entre le tuer et lui dire que tu es exploraventurier des fiches de pôle emploi à la recherche d'un travail où tu gagnes plus que le SMIC. Mais tu finis par lui dire qu'il a beaucoup d'imagination.

Mais ta petite cousine de 8 ans te dit qu'elle veut être une princesse pour avoir une robe magnifique et se faire sauver d'un tyran qui a un dragon qui crache du feu par un preux chevalier. Tu te dis, si tu es une fille que c'est un peu ce que tu fais au Mac Do. Tu portes un beau tablier et tu es emprisonnée par ton boss qui est aussi tyran devant une friteuse qui crache de l'huile mais pour ne pas briser ses rêves d'enfant, tu lui dis qu'elle sera un jour la princesse d'un beau garçon et après avoir décrit ta galère à ta tante Jacqueline qui n'en a rien à faire de toute façon. Tu retournes chez le dictateur qui te sert de boss.